Un sans-papier dénoncé par la Poste à Viry-Châtillon (janvier 2010)ALOU* n’en revient toujours pas.
Ce sans-papiers malien de 27 ans, placé au centre de rétention administrative (CRA) de Palaiseau depuis le 16 décembre et menacé d’expulsion, a été arrêté après avoir voulu ouvrir un compte à la Banque postale. Il y a un plus de deux mois, le jeune homme se rend à l’agence centrale de la Poste, à Viry-Châtillon (Essonne). Il remplit les formulaires nécessaires et présente sa carte de séjour. Une semaine plus tard, l’agence le convoque, lui explique que sa carte est fausse — ce dont il convient volontiers—et qu’on lui refuse l’ouverture de son compte. « On a parlé cinq minutes et je suis reparti, déçu mais pas inquiet », explique-t-il. La direction assume  Deux mois s’écoulent. Alou reçoit une convocation, sans motif précis, du commissariat voisin. Inquiet, il s’y rend avec trois membres d’une association de soutien aux sans-papiers. Pas une minute, il ne fait le lien avec la Poste. Et pourtant. « Nous l’avons attendu plusieurs heures, raconte Claudette Seze, qui l’accompagnait

 

ce jour-là. Puis nous avons appris qu’il était en garde à vue pour faux et usage de faux et infraction à la législation sur les étrangers. Nous ne l’avons plus revu », conclut cette militante.

 

Alou, lui, reste stupéfait. « Ma carte m’a servi pour avoir un téléphone. Beaucoup de sans-papiers ouvrent des comptes avec des faux. Parfois, les banques refusent, mais c’est la première fois que je vois ça ! » La direction de la Poste assume. « Dès qu’un faux est présenté, nous faisons systématiquement un signalement au procureur de la République.

 

Ce n’est pas de la délation. Il peut s’agir d’une tentative d’escroquerie! Cela prouve que nos contrôles sont au point. » Quinze jours après son arrestation, Alou ne sait toujours pas ce qu’il va devenir. Ni le consulat du Mali, qui doit donner son feu vert pour l’expulsion, ni le juge, auprès de qui il a introduit un recours pour vice de procédure et qui pourrait le libérer,

 

n’ont fait part de leur décision.

 

Louise Colcombet / Républicain

 

* Le prénom a été modifié.

 

De nombreux cas similaires

 

Le cas d’Alou*, ce sans-papiers malien arrêté après avoir voulu ouvrir un compte à la Banque postale n’est pas isolé. En octobre, un Mauritanien avait connu la même mésaventure en voulant retirer de l’argent à la Société générale de

Boulogne (Hauts-de-Seine). Et cet été, toujours dans des banques, deux personnes avaient été arrêtées,

 

l’une en retirant sa carte bleue

 

dans une agence du Crédit lyonnais

 

d’Aulnay-sous-Bois (Seine-

 

Saint-Denis) et une lors d’une ouverture

 

d’un compte au CIC de

 

Montrouge (Hauts-de-Seine).

 

Mais les banques ne sont pas

 

les seules institutions pointées du

 

doigt par les défenseurs des sanspapiers.

 

En juillet, un Malien de

 

34 ans a été arrêté à Evry (Essonne)

 

après avoir voulu changer

 

de téléphone dans un magasin

 

Bouygues. L’assurance maladie

 

elle-même a été mise en cause

 

après l’arrestation, en février, d’un

 

Angolais dans les locaux de la

 

Caisse primaire d’assurancemaladie

 

d’Auxerre (Yonne). Gravement

 

malade, celui-ci avait finalement été relâché.